Samstag, 23. April 2022

Conférence de Raira Bohrer dos Santos sur le BDSM en ligne

 

Aujourd’hui nous avons eu la chance de rencontrer une seconde anthropologue. Elle se nomme Raira Bohrer dos Santos et est docteur à l’Université Fédérale de Fluminense au Brésil. Sa conférence portait sur son sujet de doctorat, soit les pratiques sexuelles en ligne et hors ligne des communautés BDSM  brésiliennes. Plusieurs choses m’ont paru particulièrement intéressantes, et j’aimerais les partager ici même.


Contrairement à la recherche de Boris, qui était plus « hors-ligne » que « en ligne », et plus « unidirectionnel » (en examinant uniquement les pratiques des jeunes brouteurs adijanais), cette fois l’imbrication en-ligne-hors-ligne était beaucoup plus resserré. En effet, les pratiques BDSM au Brésil semblent passer assez fluidement et facilement du « hors ligne » (dans des clubs) au « en ligne » (Second Life (SL), Fetlife, Whatsapp, etc.), dans une sorte de continuité (à part pour certains sous-groupes qui ont tendance à dévaloriser les pratiques en ligne). La recherche de Raìra était également multimodal et connective (Hine, 2020) : elle suivait ses interlocuteurs de « lieux » en lieux, de l’ « en ligne » (migrer de SL à Fetlife, à WhatsApp, à Tinder, etc.) au « hors ligne » (visite de clubs).

La plateforme Fetlife (dérivé du mot « fetish »), que je ne connaissais pas du tout, est particulièrement bien adapté à la pluralité des personnes et des pratiques du milieu BDSM : à l’autoétiquetage par catégories discrètes des autres réseaux sociaux, et à l’unidimensionalité des liens entre profils de ceux-ci, Fetlife oppose des possibilités très diverses de mise en relation entre les utilisateurs. Ses affordances ont quelque chose d’assez unique.


Autre aspect fascinant de la recherche : le rôle crucial de la communauté. On pourrait croire que des pratiques d’ordre sexuel comme le BDSM se passe « en privé », et que les réseaux sociaux ne font que permettre de mettre en lien des gens qui ont de la difficulté à se trouver dans la vie « réelle » (IRL) – vu le tabou social général entourant une telle pratique sexuelle. Or il appert que la communauté intervient régulièrement dans les relations sexuelles entre personnes, notamment par le filtrage/la sélection qu’elle exerce sur l’entrée dans la communauté (pour se joindre aux groupes WhatsApp, tout un processus est mobilisé, avec entrevues, etc.), la surveillance qui s’exerce sur les pratiquants (il faut « bien faire » les choses, il faut protéger les personnes qui peuvent avoir de la difficulté à exprimer un « stop » au consentement, etc.), mais aussi par les pratiques multiples en solitaire (mais partagées par voies de photos ou description au groupe) ou en plus grand nombre (certaines scènes sont élaborées collectivement et non uniquement en « couples »). De plus, bien qu’une certaine tension normative existe entre les pratiquant d’un BDSM supposément exclusivement « réel » et celleux qui pratiquent en ligne (sur SL par exemple) par la médiation d’avatars, force est de constater que les pratiques les liens relationnels sont très multiples et très pluriels, beaucoup plus que je ne le suspectais.


La « position » de Raira a beaucoup varié selon l’évolution du terrain, et c’est aussi ça que j’ai trouvé intéressant. Celle-ci devait, pour bâtir la confiance avec ses interlocuteurs, se « commettre » un peu, et ne pas se contenter d’un rôle de pure observatrice. Elle a dû, éventuellement, non plus juste se présenter comme anthropologue mais se « caractériser » via ses profils (notamment sur Fetlife comme « hétéroflexible » et « switch » par exemple), et participer à certaines activités BDSM : elle nous a décrit sa participation à un atelier de « bondage » particulier, le « shibari » (qui lui plaisait particulièrement esthétiquement parlant) et une expérience de BDSM sur SL, où elle a pris le rôle de soumise.

Line Art Shibari Females With Red Rope Vector Illustration Isolated On  White Background Royalty Free SVG, Cliparts, Vectors, And Stock  Illustration. Image 118007949.

Je terminerais ce billet de blogue sur l’enjeu de la corporalité. En effet, Raira nous expliquait que c’est sous l’angle du rapport au corps que le BDSM en ligne et hors ligne l’avait particulièrement intéressé. Comment vit-on une expérience aussi « charnelle » que le BDSM par Internet ?! De ce que j’en ai compris, bien que ça ne soit pas littéralement une expérience sensorielle de contact entre des objets et la peau, il semble qu’il y ait tout de même un certain vécu corporel lors d’une pratique BSDM en ligne. Au travers des jeux de rôle, au travers des commandements, de l’emploi des « stickers », c’est une sorte de « couche » corporelle supplémentaire qui est « touchée », une sorte d’extension du corps propre, qui permet de ressentir dans sa chair même le plaisir, qu’il soit physiquement provoqué par autrui ou non.

Bien que ce milieu soit très loin de mes centres d’intérêts habituel, j’ai appris beaucoup de choses aujourd’hui, à la fois sur l’importance de la matérialité des pratiques numériques et de l’interaction entre « en ligne » et « hors ligne » dans la recherche anthropologique, mais aussi sur le très vaste et diversifié monde du BDSM.

 

Sonntag, 2. Juni 2013

Chalet au lac Humqui

Extérieur:


Intérieur:

  • Salon/cuisine



  • "Grande" chambre:
  • "Petite" chambre:

  •  Salle de bain:
  • Corridor:
  • Remise:


  •  Vue sur le lac: